T'amyhuan Raegoh

10ème soleil de la 3ème lune ombrale 1582

Ceci n'est pas un journal... enfin pas à proprement parler.
Ce carnet voit le jour sous les conseils de mon compagnon. Une façon, selon lui, de vider mon esprit de tout ce que peuvent me chuchoter les voix... mais aussi les messages qu'on m'envoie parfois par rêves ou par images.

Je m'appelle T'amy et je suis … bonne question, que suis-je ? Qu'est-ce qui me définirait le mieux ? Le lieu d'où je viens ? Mes origines ? Ma profession ? Un peu tout cela peut-être... bien, dans ce cas commençons simplement :

Je suis T'amy. Mon nom complet est T'amyhuan Raegoh, mais je me présente comme étant T'amy. Pourquoi ? Parce que ceux qui m'appelaient T'amyhuan mettaient tellement de haine et de mépris dans mon prénom que j'ai fini par le prendre en horreur. Et j'use peu de mon nom de famille puisqu'il m'a été retiré d'une certaine façon. Je suis une sang mêlée née et élevée dans la tribu T. J'ai appris, sur le tard, une chose sur mon père véritable, il s'agissait d'un lunaire.

C'est surement de lui que je tiens cet amour de la nuit et des étoiles. Tout ce que je sais, c'est que mon double héritage, solaire et lunaire, ont surement œuvré ensemble pour faire de moi ce que je suis aujourd'hui : une miqo'te qui va bientôt célébrer son 18ème été et qui doit apprendre à gérer sa vie en transmettant les messages des morts et les visions et prédictions des étoiles.


Comme j'écrivais plus tôt, ce carnet est donc là pour libérer mon esprit de tout ce que je peux entendre... cela ira des visions qu'on m'envoie, les étranges messages qu'on me transmet... les chants que j'entends parfois, ou aussi les histoires que l'on me conte. Car oui, les morts et les étoiles ont parfois des histoires à raconter.

En parlant d'histoire à raconter... à quoi  pensez-vous en observant les étoiles ? Ne vous-êtes-vous jamais demandé ce qu'elles pouvaient voir et faire tout là-haut ? Et si les étoiles étaient... des sortes de gardiennes des mondes visibles et invisible . Et, imaginez alors que d'autres étoiles cherchent, par leur brillance ou leur chaleur, à dévorer ces mondes. Imaginons maintenant que certaines de ces étoiles soient capable de se mouvoir, de se matérialiser et de vivre à nos côtés, observant et apprenant, mais surtout nous protégeant. De qui ? De quoi ? D'une autre étoile qui cherche à annihiler ses sœurs afin de pouvoir dévorer notre monde.

Voici le genre d'histoire que me racontent parfois les voix et les étoiles... voici l'une des histoires que je vais livrer ici... au fil de mes inspirations éthérées... au fil de ce que me raconte les voix, l'histoire de cinq étoiles, cinq sœurs, qui ont depuis longtemps appris à marcher dans les mondes.

15ème soleil de la 3ème Lune Ombrale 1582

Les voix ne sont pas que cris et complaintes. Parfois, elles me partagent des histoires, des conseils, voir même des chants.

S'il est une chose que j'ai appris depuis que Karen m'a appris à lire, c'est que les écrits aident à se souvenir, à garder une trace. Pourquoi les voix me racontent tant de chose ? peut-être simplement parce qu'elles souhaitent qu'une trace de leurs histoires soit conservée quelque part...

Parions que ce soit cela. Si ça peut leur donner le repos et permettre à certaines d'aller dans la Grande Mer d'Ether, alors j'écrirai ce qu'elles me chuchotent.

Je commence avec l'une des histoires que j'entends souvent. La voix qui murmure cela est douce, vibrante et triste à la fois. J'appelle cette histoire "L'enfant de la forêt"

Par un doux matin de printemps, un jeune miqo'te traversa la forêt avec son arc et son carquois. Alors qu'il était pris de l'intention de chasser, il entendit au loin une jeune fille chanter. Ne pouvant résister à l'envoutante voix, il s'enfonça de plus en plus loin à la recherche de l'enchanteresse. C'est alors qu'il découvrit, bien cachée dans la forêt, la nymphe à la voix d'or, qui, dans un magnifique saule, vivait.

Pris d'amour au premier regard, le miqo'te interpella la belle : "Viens avec moi, belle demoiselle. Sors du lit de ton saule et accompagne moi par delà la forêt." Et tandis qu'elle écoutait, assise au milieu d'un cercle de fée, la nymphe observait, avec sérénité, le chasseur passionné et, secouant la tête, déclina simplement son offre.

Regarde-moi maintenant,
un rayon de lumière dansant sous la lune
Regarde-moi maintenant,
je ne peux quitter cet endroit
Ecoute-moi maintenant, la tension
d'une chanson dans la forêt
Ne me demande pas de te suivre où tu vas


Un jeune miqo'te traversa la forêt, une fleur à la main et un manteau vert sur le dos. Il ne songeait qu'à la chevelure de feu et au regard d'émeraude de son bel amour. Elle était toute drapée de beauté, et qui était si jeune et pourtant si sereine.

Il se tenait là sous le saule et, lui donnant la fleur jaune, il lui déclara :"Demoiselle, tu as capturé mon cœur. Oh par le ciel et la terre, je voudrais par dessus tout être ton époux". Mais la belle lui répondit alors que jamais elle ne l'épouserait, ni aujourd'hui, ni demain, ni jamais.

Regarde-moi maintenant,
un rayon de lumière dansant sous la lune
Regarde-moi maintenant,
je ne peux quitter cet endroit
Ecoute-moi maintenant, la tension
d'une chanson dans la forêt
Ne me demande pas de te suivre où tu vas

Un jeune miqo'te traversa la forêt avec, à la main, une hache plus tranchante qu'un couteau. Avançant dans la sylve profonde et le cœur se languissant de la belle, il ne cessait de répéter pour lui même : "Je prendrai la fée aux yeux verts ! Elle sera ma femme. Avec elle, j'élèverai mes enfants, avec elle, je vivrai ma vie !".

La nymphe pleura amèrement lorsqu'il arriva près d'elle et lui dit qu'il allait la libérer. Le miqo'te prit alors sa hache et l'utilisa, encore et encore, afin d'abattre le saule ancien.Observant le résultat, un sourire aux lèvres, il tendit alors la main vers la belle en lui disant :"Désormais ton arbre est tombé, désormais tu m'appartiens"

Regarde-moi maintenant,
un rayon de lumière dansant sous la lune
Regarde-moi maintenant,
je ne peux quitter cet endroit
Ecoute-moi maintenant, la tension
d'une chanson dans la forêt
Ne me demande pas de te suivre où tu vas

Elle le suivit hors de la forêt, et s'effondra sur la terre pesante. Ses pieds avaient marché, mais tandis qu'elle s'éloignait du vert royaume de sa naissance, sa peau et son cœur se flétrirent. Par son amour égoïste, le miqo'te avait condamné la belle, qui se fana alors comme une fleur, beauté devenue éphémère, car on ne peut prendre à la forêt ce qui n'est jamais supposé en sortir.

20ème soleil de la 3ème lune ombrale 1582

Les voix que j'entends ne sont pas toujours les mêmes. Elles sont parfois jeunes, parfois vieilles, souvent douces, parfois emplie de colère, et toujours emplies du besoin d'être entendue. Parfois, au son cristallin de leur murmure se joint la caresse de leurs doigts qui me glace le sang et alourdit mon cœur.

C'est l'effet qu'a eu cette voix aujourd'hui. Une voix douce et vibrante comme un cristal clair, mais dont le son et les mots n'ont fait qu'apporter un voile de tristesse. Je crois que c'est son histoire qu'elle m'a racontée… je ne peux garder en moi leurs maux et leur tristesse.


Il y a fort longtemps, j'ai connu un royaume où tout était fait de verre. Le palais, leurs rêves, leurs cœurs, absolument tout était en verre. Et pourtant, dans ce royaume, la chose la plus incroyable était un rossignol petit et insignifiant.
Il vivait au bord de la rivière et possédait une voix si séduisante que le Roi finit par entendre parler de son chant merveilleux. Il invita alors le rossignol à chanter dans le palais. Il chanta tant et si bien de son pépiement enjôleur que le roi en fut ému jusqu'aux larmes. Il demanda alors au rossignol de rester au palais et lui fit construire une magnifique cage de verre.

Le petit oiseau chantait et chantait, mais les humains n'en avaient jamais assez. Sa voix s'affaiblissait de jour en jour et ses chansons se devinrent chaque jours plus tristes. Elles lui rappelaient sa liberté et la sensation du vent à travers ses ailes. Lorsqu'il rêvait, le rossignol se voyait au bord de la rivière. Dans ses rêves, il était libre.

Ses chansons étaient les lamentations d'une vie meilleure, et avec le temps, les humains se lassèrent du petit oiseau. Ils l'abandonnèrent dans sa belle cage. Il devint une relique des temps anciens, le souvenir des rêves faits de verre qui attendait son dernier souffle.


Un jour, une enfant se tenait devant la cage et toucha doucement celle-ci. La fille était pâle et n'avait jamais dit un mot Elle ouvrit la cage, mais le rossignol était devenu trop faible pour bouger ses ailes. L'adorable enfant prit l'oiseau délicatement entre ses mains et l'amena à la rivière.

Pour une dernière fois, le rossignol vit de nouveau le soleil avant de fermer les yeux. Cependant, en mourant, une part de lui s'insinua dans la jeune fille et ils ne firent plus qu'un. Dès lors, l'enfant brisa son silence et se mit à chanter des chansons magnifiques et magiques. Lorsqu'on l'écoutait, on avait le sentiment que le rossignol chantait à travers elle.

A partir de ce moment-là, l'enfant a aussi connu la douleur et le chagrin. Et parfois son petit cœur, qui était fait de verre aussi, souffrait de douleurs incompréhensible et d'un vide impossible à remplir. Des années plus tard, la fille devint une femme. Elle tomba amoureuse et se mit à chanter sa joie et son bonheur.
Mais un jour leur amour fut détruit. Ce jour-là son cœur, qui était fait de verre, fut brisé.

(texte inspiré par la chanson Nightingale's lament de Persephone)

29ème soleil de la 3ème Lune Ombrale 1582

Parfois les mots viennent juste d'eux-mêmes. Non pas contés ou chantés par les morts, mais inspirés par les vivants.
Cette fois, ce n'est pas pour raconter l'histoire d'un être qui cherche à rejoindre la Grande Mer d'Ether que je prends mon carnet, mais plutôt pour écrire ce que m'inspire celui que j'aime… celui qui, dans ce Monde, fait vibrer mon être comme jamais personne ne l'a fait.

Enfant du sable et des étoiles,
Je suis l'air, le vent qui joue avec tes cheveux,
Je suis la chaleur bienfaisante du soleil sur ta peau,
Je suis la pluie qui ruisselle, apaisante, sur ton corps.

Tu es la pierre de vie, symbole de célébration; de pardon et de foi.
Tu es la force immuable, mémoire ancestrale qui toujours grandi.
Tu es la cascade rafraichissante qui inonde mes bras,
Tu es présent dans l'instant, brillant de toute ta lumière.



Je suis doute, tu es certitude
Je suis le vent, l'occulte, l'intuition qui parfois brûle.
Je suis néant, lune et lumière,
Tu es le chemin et la récompense.

Ta main dans la mienne, nous suivons la danse du Destin.
Tu es le feu sacré qui inonde mes reins,
Je suis cet absolu, sans limite et sans loi.
Je suis tout, je suis toi. Ensemble, nous serons Amour et Joie